Des rives de la Méditerranée à l'Orient, de la Turquie aux sources du Gange, en suivant d'anciennes routes commerciales, parcourues par les caravanes depuis plusieurs millénaires, c'est, autant que possible, à pied que Matthieu et Françoise dérouleront un long chemin. En 2016, le premier mouvement de cette aventure les a conduits d'Istanbul à Téhéran en traversant l'Anatolie, les rivages de la Mer Noire, la Géorgie et l'Arménie. Fin août 2017, repartant de Téhéran, ils gagnent la Mer Caspienne ; puis après un transit rapide du Turkménistan, ils rejoignent l'Ouzbekistan, Boukhara, Samarkand, traversent la Ferghana puis atteignent fin novembre 2017 Bishkek, la capitale kirghize. Début septembre 2018, ils quitteront Och au Kirghizstan pour Irkeshtam d'où ils pénétreront en Chine ; puis après la traversée de la Kunjerab Pass, ils enteront au Pakistan, puis atteindront l'Inde et continueront vers Haridwar, but de leur périple.

vendredi 5 août 2016

Les caravanes des temps modernes

Le long de la route nationale D100, les journées de marche peuvent s'avérer longues et fastidieuses. C'est le cas entre Bolu et Yeniçaga. Nous avions ce matin là, soit sous-estimé la distance, soit surestimé notre résistance. Nous enchaînions depuis le lever du soleil lignes droites interminables et montées. Le paysage commencait à se faire plus campagnard. Un çaï (thé), souvent offert, puis un deuxième, puis une chorba  (soupe), puis un nouveau çaï, un repas léger pris dans un petit restaurant de village, une petite sieste, ... Mais somme toute rien de suffisamment  consistant pour cette étape. C'est comme ça qu'on s'est retrouvé à 7 heures du soir, au bout de 38 km avec un début de fringale. Bonheur ! Au sommet d'une côte, une de plus, près d'une fontaine, nous sommes appelés par deux familles parentes qui avaient décidé de pique-niquer avant de rentrer à Ankara. Ils nous invitent chaleureusement. Nous acceptons, bien sûr. Attention le concept de pique-nique turc est assez éloigné de son cousin français. Il ne s'agit pas d'avaler quelques sandwich. Ici, on cuisine. Quelques morceaux de bois, quatre pierres et voici un fourneau. Aussitôt, on fait rissoler de la viande. Sur la natte, une femme découpe avec virtuosité des oignons qui vont bientôt rejoindre la viande.


Les tomates et les concombres sont débités pour faire une salade. Le pain est coupé. La grosse pastèque est tranchée. La viande est prête.






Nous mangeons, assis sur les nattes. C'est délicieux. L'ambiance est amicale et charmante.





Mais le soleil se couche ; en un temps record tout est lavé et rangé. Les voitures sont chargées et c'est dans la voiture de nos hôtes que nous faisons les 2 derniers kilomètres qui nous conduisent à Yeniçaga. Ils ont absolument tenus à nous accompagner à un hôtel soucieux de notre sécurité alors que la nuit était tombée. Nous quittons nos amis de passage avec des étreintes chaleureuses (entre hommes, entre femmes).

Le lendemain, c'est un thé improvise qui nous a été offert près d'une fontaine également. En Turquie, il semble que le samovar est une pièce importante de l'équipement du voyageur. Nous hésitons encore à en acheter un...



M & F

En route vers Gerede

Nous quittons Bolu au petit matin. Peu après être sorti de la ville, les voies de gauche de la route sont coupées et toute la circulation est ramenée sur les voies de droite. C'est toujours un bonheur pour les marcheurs qui peuvent alors bénéficier d'un espace de marche confortable. Nous nous engouffrons aussitôt dans cette route providentielle  en pensant que des travaux y sont en cours. Pas du tout. Il s'agit d'un camp militaire protégé par des blocs de béton cyclopéens. Et bien sûr, la, juste devant nous, une voiture de police. Nous nous faisons tout petits, on nous appelle, nous nous exécutons. Et nous sommes accueillis par une poignée de main, un grand sourire et on nous tend un paquet de biscuits au chocolat. La journée commence bien et nous avons comme l'impression que les deux marcheurs fous commencent à devenir connus et que la légende se dissémine de place en place.


M & F

dimanche 31 juillet 2016

Dimanche à Bolu

Nous sommes depuis hier soir dans la ville de Bolu dont nous affectionnons le nom. Située à 900 m d'altitude dans une région qui aurait été traversée par Alexandre le Grand. Elle reste connue depuis l'antiquité surtout pour les vertus curatives de ses eaux thermales. De nombreux tremblements de terre ont affecté la ville qui exhibe néanmoins quelques anciens caravansérails et mosquées restaurées.



Très récemment, Bolu a fait partie des villes dont les habitants ont résisté aux tentatives de putsch qui ont fini par échouer ; la ville est citée en exemple parmi d'autres et des manifestations populaires en faveur de la "démocratie" y sont encore organisées.



Pour atteindre Bolu, il nous a fallu grimper une cote de 15 km à 10% qui nous a éprouvés. Par une chaleur ne dépassant guère 39 degrés, nous avons ressenti le besoin de faire quelques pauses au milieu des arbres pour aérér nos pieds devenus chauds bouillants par la chaleur du bitume. Nous regardons avec envie les enfants qui jouent avec l'eau.




Notre marche en pleine chaleur en Anatolie nous oblige à rythmer soigneusement nos étapes et à prendre les précautions nécessaires afin de ne pas mettre un terme prématuré à notre projet. En effet, deux expériences rapprochées de plus de 35 km par jour, qui nous ont laissés quelques séquelles douloureuses, nous ont amenés à augmenter les temps de pause et à bien surveiller notre hydratation (l'équivalent de 4 litres d'eau par personne). Nous sommes descendus à une vitesse de croisière moyenne de 28 km jour.
Et dans notre rythme de marche, nous allons nous ménager un jour de repos tous les huit à dix jours afin de s'assurer d'une bonne récupération. C'est le moment alors de nous livrer à quelques activités impossibles les soirs ordinaires (notes, correspondance, blog). En effet, chaque jour, il nous faut trouver un logement, effectuer les achats pour le lendemain, identifier les conditions de route, cartographier l'étape à l'aide dé Wifi, Google Map sur smartphone, photo de l'écran, ... En dernier lieu,  se doucher, laver nos affaires et préparer les sacs. Pour information, le tarif est 8 kg pot Françoise, 11 kg pour Matthieu auxquels s'ajouteront l'eau et la nourriture.



M & F


Arifye




Si vous passez un jour sur les rives du lac Sapança en Turquie, ne manquez pas de vous arrêter dans la petite ville d'Arifye. Ce n'est certes pas un spot touristique mais, placée sur la route Istanbul-Ankara, elle vaut le détour par l'animation tranquille de son centre ville. On commence à y voir des maisons traditionnelles aux murs de briques et colombages et aux toits à quatre pans. Nous y sommes arrivés tôt après une étape relativement courte ayant fait, la veille plus de 38 km.



Arifye a certainement du bénéficier il y a quelques années d'un professeur de français et nous avons rencontré plusieurs personnes qui nous ont fait un fier étalage de leur vocabulaire. Nous y avons logé au Palas Otel, coincé entre un koaför et la police. Le terme Palas était peut-être un peu excessif mais nous y avons été chaleureusement accueilli par un jeune réceptionniste éveillé qui avait lui, visiblement sèché les cours de français (d'anglais, également). La femme de ménage avait passé 10 ans en Italie et il lui en restait un bon échantillon de vocabulaire de la langue de Dante.
Trouver un restaurant est chose importante en voyage. Et à Arifyie, nous sommes tombés sur le restaurant Bi-Mola. Imagınez une isba mınıature, pourvue d'une miınuscule terrasse. Une pièce unique. Au centre, un vieux fourneau. Dans un coin, la cuisine sur laquelle règnent les grands parents. Au mur, les dessins des enfants. La fille de la maison au service. Elle nous initie aux délices de la cuisine turque. C'est ainsi que Matthieu a gouté au koefte ekmek, sorte de hamburger surdimensionné. İl a lachement jeté l'éponge avant la fin.





Le lendemain matin, nous reprenons la route à l'aube. Errements habituels dans le dédale des routes d'accès à la nationale D100 que nous projetons de suivre. Après une demie heure d'essais / erreurs et de retours sur nos pas, nous nous adressons à un policier qui a aussitôt pris sa voiture pour nous sortir de ce plat de spaghettis de bitume et nous amener dans la bonne direction.

M & F